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Depuis quelques années, la société civile et l'Etat marocain se mobilisent afin d'endiguer l'horreur des abus sexuels sur enfants. Des associations et organismes officiels se sont créés afin d'informer et de renforcer les dispositifs légaux. Le 19 novembre étant la journée internationale de lutte contre les abus sexuels sur enfants, c'est l'occasion pour Citadine de faire le point sur ce sujet sensible et tabou.
Quand on parle de pédophilie, on entend de tout, on digresse sur la tradition, le Prophète, bref, on s'égare. Alors avant toute chose, revenons sur les on-dits, les fausses croyances et les vrais problèmes. Parlons franc, qu'est-ce que la pédophilie, qu'en est-il du tourisme sexuel, les mariages précoces relèvent-ils de la pédophilie ? Autant de questions d'apparence simple mais qui recèlent en fin de compte des abîmes de confusion.
DĂ©finitions
Etymologiquement, le terme pédophilie signifie très exactement aimer (philie)
les enfants (pédo). Bien évidemment, ce n'est pas comme cela qu'on le comprend
aujourd'hui, sans quoi tout parent normal pourrait être qualifié de pédophile.
La pédophilie est donc l'attirance sexuelle pour les enfants, sans qu'elle
implique nécéssairement le passage à l'acte. C'est ce pourquoi Latifa Bennari,
algérienne vivant désormais en France, ancienne victime de sévices sexuels entre
six et 14 ans, présidente de l'association l'Ange Bleu d'information et de
prévention concernant la pédophilie, insiste sur l'importance de la distinction
entre pédophilie et pédosexualité, c'est-à -dire le fait d'avoir des rapports
sexuels avec des enfants.
Si le premier n'est légalement pas condamnable (on ne saurait en effet réprimer
ce que pensent les gens sans risquer des dérives dramatiques pour la liberté),
le second est en revanche très clairement et rigoureusement interdit par la loi,
la religion et les conventions internationales des droits de l'enfant. Cela
paraît donc simple. Néanmoins, un premier écueil se présente : comment définit-
on l'enfance ? Aux yeux de la loi, un enfant, c'est un mineur. Mais est-ce bien
la mĂŞme chose d'avoir des rapports sexuels avec un petit de cinq-six ans et avec
une jeune fille de 17 ans ? Bien sûr que non, tout le monde peut le comprendre
instinctivement, mais cela ne veut pas dire que coucher avec des adolescents
soit plus acceptable pour autant. Or certains adultes ne se sentent absolument
pas coupables de leur préférence pour les adolescents parfois très jeunes,
puisque, évolution de la société oblige, ils peuvent déjà être actifs
sexuellement. Et puis, il y a la tradition, il n'y a pas si longtemps encore, on
se mariait avant 18 ans et tout le monde trouvait cela normal, etc. Mais si
toutes les civilisations du monde ont connu les mariages précoces du fait
notamment de la faible espérance de vie, le phénomène tend à disparaître dans
les sociétés modernes, au profit d'unions au contraire tardives, après les
études et lorsqu'on est bien installé dans la vie active. Les besoins de la
société ne sont tout simplement plus les mêmes et l'âge d'être adulte et de
vivre comme tel a reculé sensiblement dans le temps. Dès lors, la nécéssité de
tenir compte de ces nouvelles données a amené la modification de la Moudawana et
l'interdiction de marier les jeunes filles en dessous de 18 ans et, mĂŞme si de
nombreuses dispenses sont encore accordées, le nombre d'unions précoces
diminuent nettement.
De l'avis de M. Khalid Cherkaoui Semmouni, porte-parole de la Coalition Contre
les Abus Sexuels Sur Enfants (COCASSE), rassemblant un large réseau
d'associations de défense des droits de l'homme et de la protection de
l'enfance, c'est là "une habitude criminelle qui se doit de disparaître au plus
vite et la loi est d'accord puisqu'elle fixe la majoritĂ©, y compris sexuelle, Ă
18 ans. Un mineur ne devrait tout simplement pas avoir de sexualité". Et de
fait, hors dispense spéciale, un adulte ayant des relations sexuelles avec un
mineur est, aux yeux de la loi marocaine et d'une morale évoluée, toujours
coupable d'agression sexuelle aggravée car l'enfant, même adolescent et même
consentant, n'est pas à même de décider de ce qui est le mieux pour lui. "J'ai
rencontré des personnes ayant eu des relations sexuelles consenties avec des
adultes, étant adolescentes et le considérant plus tard comme une initiation
trop précoce et néfaste.
on ne peut jamais savoir quelles seront les conséquences sur leur développement
affectif, c'est ce pourquoi les relations sexuelles avec des mineurs doivent
toujours ĂŞtre interdites", explique ainsi Latifa Bennari dans son livre sur la
pédophilie La Fin d'un Silence. L'adulte a donc par essence et par statut la
responsabilité de protéger le mineur, même contre lui-même et tout acte sexuel
perpétré entre un adulte et un mineur constitue un crime. Mais qu'en est-il des
relations entre adolescents, l'un mineur, l'autre tout juste majeur ? Le domaine
est délicat et les réponses sont malaisées. C'est probablement ce pourquoi le
législateur a laissé une telle latitude aux juges pour statuer au cas par cas et
accorder des dispenses quand il y a lieu. En France, où la sexualité hors
mariage ne constitue pas un délit, on a choisi un système différent, accordant
la majorité sexuelle à 15 ans mais réprimant sévèrement les adultes ayant des
rapports avec les adolescents, grâce à ce qu'on appelle le "détournement de
mineurs". On dit alors qu'il y a détournement de mineurs quand la différence
d'âge entre l'enfant et son partenaire est de plus de trois ans. Ainsi, un jeune
homme de 18 ans ayant des rapports sexuels avec une adolescente de 15 ans ne
sera pas incriminé, mais un homme plus âgé le sera. En fin de compte, on part du
principe que l'on ne peut définir la dérive sexuelle pédophile ou plus
exactement héphébophile (attirance pour les enfants pubères) que par le fait
qu'on est soi-même sorti de l'adolescence, sans quoi cela relève de l'évolution
normale.
Réalité & fausses croyances
Contrairement aux idées reçues, la pédophilie n'a par essence rien à voir avec
l'homosexualité et les abuseurs sont de toutes tendances. De même, tous les abus
sexuels sur mineurs ne sont pas perpétrés par des pédophiles, mais parfois par
des gens tout à fait "normaux" qui, un jour, sont pris de désir pour un enfant
en particulier ou qui se trouve à proximité et non par les enfants en
général.
D'ailleurs, selon Latifa Bennari, que son expérience du terrain a fait
reconnaître comme un expert en la matière, de nombreux pédophiles sont
abstinents par Ă©gard pour les victimes potentielles ou passives, se contentant
de fantasmer sur une possible relation sexuelle Ă©panouissante avec un enfant
sans jamais passer à l'acte. Comme quoi, décidémment, la réalité n'a pas grand-
chose à voir avec ce que l'on peut en penser au préalable. Mais continuons :
bien que plus rares, les abuseurs sexuels femmes existent et provoquent tout
autant de ravages chez leurs victimes. Par ailleurs, et c'est lĂ tout le noeud
du problème, les prédateurs sexuels qui s'attaquent aux enfants par hasard sont
statistiquement assez rares comparés aux parents coupables d'incestes et aux
proches en général. Bien qu'il soit difficile d'obtenir des chiffres au Maroc
étant donné le peu de cas d'abus sexuels rapportés comparé à leur probable
occurence réelle, COCASSE déclare constater que 75% des victimes sont agressées
par un membre de leur famille, ce qui est corroboré par l'expérience
internationale qui considère que dans près de 90% des cas selon l'OMS, la
victime connaît son abuseur qui est pour elle un adulte référent au sens large,
parent, professeur, ami de la famille. Dès lors, on comprend mieux pourquoi le
spectre de la "hchouma" et de la dislocation familiale pèse lourd sur la société
car s'il est facile de stigmatiser le pervers qui enlève des enfants, est-il
aussi aisé de repérer puis dénoncer son mari, sa femme, son frère, son ami de
toujours ou l'instituteur "bien intentionné" ? Enfin, deux nouveaux phénomènes
ont fait récemment leur apparition : le tourisme sexuel et la large diffusion de
la pédopornographie facilitée par Internet qui garantit un relatif anonymat.
NĂ©anmoins, selon Latifa Bennari, contrairement Ă ce que l'on pourrait penser,
"force est hélas de constater qu'une grande majorité de cette exploitation émane
des citoyens du pays, des proches en l'occurence." Une étude réalisée par
l'Unicef en 2003 dans la ville de Marrakech, connue pour son afflux touristique,
confirme sobrement les faits et précise que "les clients [des enfants
prostitués] sont des étrangers (touristes ou résidents) et des Marocains pour
71% d'entre eux, uniquement des Ă©trangers pour 17% et uniquement des Marocains
pour 12%. Les filles ont moins de clients étrangers que les garçons."
Mariages politiques
"Le mariage de notre prophète Sidna Mohammed avec Lalla Aïcha a été et continue
à être un argument pour légitimer une transgression à la loi et à la morale.
Car, à travers les divers témoignages et les études faites sur le profil du
Prophète Mohammed, il s'avère qu'il n'avait aucune caractéristique pédophilique
compte tenu de son parcours sentimental. Je considère et je dis clairement que
ces personnes cherchent à se dédouaner ou à se déculpabiliser par rapport à une
relation pédophilique", déclare très fermement Latifa Bennari. Et en effet, ne
faut-il pas se souvenir que le Prophète était également un homme politique et un
chef de guerre ? Dans cette optique, son mariage avec la très jeune Lalla Aïcha
est bien plus compréhensible, car il se rapproche d'une coutume profondément
enracinée dans la vie politique des nations : le mariage rapide des futurs
souverains pour assurer des alliances. Ainsi, au XVIIème siècle, l'Infante
Marie-Thérèse d'Espagne est-elle proposée en mariage à l'âge de huit ans pour
finalement ne le faire "qu'à " 15 ans et Anne d'Autriche, à peu près à la même
époque est fiancée à neuf ans, mariée à 13. Je crois même me souvenir qu'il
avait été fortement question de mariage quasiment à sa naissance pour la reine
d'Ecosse Marie Stuart qui héritât du trône à six jours, mais que cela ne s'était
pas fait pour ne pas affaiblir la régence. bref, vous pensez bien que ces
mariages n'étaient pas consommés immédiatement et que, même lorsque, encore pour
des raisons politiques, ils l'Ă©taient, comme dans le cas d'Anne d'Autriche,
l'inexpérience des deux époux les firent se délaisser durant plus de trois ans
après l'épouvantable nuit de noce. Dès lors, soyons objectifs et remettons les
choses à leur place : se targuer d'un mariage politique précoce pour justifier
la pédophilie est une trahison de la religion, de la morale et des enseignements
du Prophète.
Données objectives
Comme nous le disions plus haut, il est très difficile d'obtenir des données
chiffrées représentatives de la réalité concernant les abus sexuels sur enfants
parce que très peu de cas sont au final rapportés. D'ailleurs, un rapport de la
Commission des Droits de l'Enfant (réalisé par l'Observatoire National des
Droits de l'Enfant ou ONDE), adressé aux Nations-Unies dantant de 2006, précise
que "pour ce qui est des agressions sexuelles, les services de police ont
enregistré 317 cas dont 222 concernant des filles en 2002, 395 dont 240
concernant des filles en 2003 et 475 cas dont 332 concernant des filles en 2004.
L'exactitude des statistiques dépend de la mesure dans laquelle les cas sont
signalés aux autorités par le biais du numéro vert de l'ONDE et, surtout, aux
services de police et au bureau du procureur général auprès des tribunaux du
Royaume. Il est toutefois certain que de nombreux cas ne sont pas portés à la
connaissance de ces instances." Néanmoins, comme le problème est mondial et ne
présente au final que peu de rapports avec un trait sociétal particulier, il est
intéressant de comparer ces chiffres avec ceux qui sont constatés ailleurs. Or
selon le Centre National Américain pour les Enfants portés Disparus et
Exploités, (National Center for Missing And Exploited Children), on évalue à une
femme sur cinq et un homme sur dix le nombre de victimes d'abus sexuels Ă©tant
enfants, ce que tendrait Ă corroborer, voire Ă exacerber, une Ă©tude faite par le
Journal Américain de Médecine Préventive (American Journal of Preventive
Medicine) datant de 2005 et qui fait Ă©tat d'une femme sur quatre parlant de
sévices sexuels subis durant leur enfance, en grande majorité du fait
d'agresseurs masculins. Concernant la pédopornographie, la Fondation de
Surveillance d'Internet (Internet Watch Fundation) affirme dans son rapport
annuel 2006 que c'est un domaine en constante expansion. Ainsi, en 2004, elle
recensait 3433 sites pédopornographiques contre 10656 en 2006. Enfin, la nature
de la demande en contenu pédopornographique empirerait avec le temps pour se
diriger vers les abus sexuels commis avec une extrĂŞme violence, sadisme ou
impliquant la pénétration par un animal. Or si la réalisation même de ces
documents a demandé la torture de petits enfants d'une manière atroce, cela
n'est pas la fin des horreurs car, comme le démontre une étude néo-zélandaise
des affaires internes (New Zealand's Department of Internal Affairs. Internet
Traders of Child Pronography : Profiling Research de Caroline Sullivan), il
existerait une très forte corrélation entre la consommation de pédopornographie
et les actes d'abus sexuels. En clair, regarder des vidéos pédopornographiques
pourrait pousser à l'acte des pédophiles jusque-là abstinents et, s'ils le
faisaient, ce serait probablement de la manière qui est représentée dans les
films auxquels ils ont eu accès.
PĂ©dophilie & loi
Les chiffres sont donc alarmants, mais rassemblent sous la mĂŞme appellation
d'abus sexuels les viols et les attentats Ă la pudeur. En effet, pour qu'il y
ait viol, il faut qu'il y ait eu pénétration d'un objet ou d'une partie du corps
dans un quelconque orifice de la victime (vagin, anus, bouche). Au Maroc,
l'attentat Ă la pudeur rassemble tous les autres abus sexuels possibles, tels
que l'obligation faite Ă un enfant d'assister Ă des actes sexuels, les
attouchements divers, l'obligation faite Ă un enfant de pratiquer des caresses Ă
caractère sexuel, etc. Le viol sur mineur est un crime pour lequel les peines
encourues et décrites dans les articles 484 et suivants du code pénal dépendent
des relations de la victime Ă son agresseur et de la violence de l'acte.
Néanmoins, la peine minimum est de dix ans de réclusion criminelle pour un viol
sur mineur sans violence et va jusqu'Ă trente ans pour un viol avec violence
commis par un membre de sa famille. L'attentat Ă la pudeur est lui, puni de deux
Ă dix ans de prison, en fonction des circonstances mais il ne s'agit que d'un
délit et le délai de prescription est de seulement cinq ans. Par ailleurs, il
faut noter que le Maroc a signé dès 1993 la Convention Internationale des Droits
de l'Enfant et son Protocole Facultatif concernant la vente d'enfant, la
prostitution et la pédopornographie en 2004, entamant par là -même de grandes
réformes législatives afin de refléter l'esprit de ces accords. Ainsi, trois
nouvelles infractions ont été introduites dans le code pénal par la loi n°24-03
promulguée en 2003 : la vente et l'achat d'enfant, passible de deux à dix ans de
prison, le travail forcé pour lequel les peines prévues vont d'un à trois ans de
prison et la pornographie mettant en scène des enfants, passible d'un à cinq ans
de prison. Il est à noter qu'il s'agit de délits et qu'en tant que tel, comme
pour l'attentat à la pudeur, le délai de prescription est de cinq ans. Les
intermédiaires ayant facilité l'exploitation, la vente ou la pornographie
enfantine sont également passibles des peines mentionnées et ce, même si
certains des éléments reprochés ont été commis dans un autre pays. Enfin, la
réclusion peut être accompagnée d'amendes très fortes pouvant atteindre 1
million de dirhams.
PĂ©dophilie & provocation
Certains agresseurs pédophiles sournois invoquent la "provocation" de la victime
qui aurait été "consentante". Ce discours horrible est innacceptable car il
laisse entendre que l'enfant peut ĂŞtre en mesure de comprendre les enjeux
sexuels de l'adulte, les refuser ou les accepter. Or tel n'est pas le cas, c'est
bien pour cela entre autres qu'il est mineur, c'est-Ă -dire qu'il n'est pas
responsable de ses actes. Tous les enfants ont besoin d'affection et de marques
de tendresse. Un tel pervers sexuel pourrait prendre, si l'on n'y prĂŞte pas
attention, prétexte de ces besoins exprimés pour justifier toutes les horreurs.
Par ailleurs, un grand nombre d'enfants ressentent le besoin naturel de plaire
et donc de séduire, surtout à la préadolescence ou les débuts de la puberté. On
a également prouvé l'existence dans certaines sociétés de la prévalence du
syndrôme d'Oedipe qui ferait partie du développement normal de l'enfant. Cela ne
signifie en aucun cas qu'ils soient suffisamment matures pour supporter
psychologiquement une relation sexuelle et encore moins qu'ils recherchent
effectivement un rapport sexuel incestueux ! Il n'y a aucune justification
possible à l'abus sexuel sur enfants et toute forme de sexualité perpetrée entre
un adulte et un enfant est criminelle.
Organismes & associations
Le rôle de l'ONDE (Observatoire National des Droits de l'Enfant fondé par feu SM
Hassan II et présidé par SAR Lalla Meryem) et des associations de la société
civile a été primordial dans cette refonte des textes de loi et leur respect
dans la jurisprudence. En effet, il y a quelques années, il n'était pas rare que
les viols sur mineurs n'entraînent que des peines légères correspondant plutôt
aux attentats à la pudeur. Comme le précise Mme Najat Anwar, présidente de
l'Association Touche Pas Ă Mon Enfant, "il y a cinq, six ans, les jugements
étaient encore obsolètes. Toutefois, [...] les jugements sont de plus en plus
justes et en relation avec les normes juridiques. L'association reste vigilante
afin que les agresseurs soient justement punis." Le porte-parole de l'ONDE M.
Raji affirme, quant à lui, que "parmi les actions menées par l'ONDE, on note le
processus d'harmonisation de la législation nationale avec les dispositions de
la convention des Nations-Unies relative aux Droits de l'Enfant. Ce processus a
concerné tout l'arsenal juridique, y compris les textes des lois concernant la
protection des enfants. On doit également faire référence au plan d'action
national de l'enfance 2006-2015, adopté par le conseil de gouvernement le 25
mars 2006, qui incite Ă adapter et veiller Ă l'application des mesures
législatives de protection contre toutes formes d'abus commis à l'encontre des
enfants." Pour COCASSE, cependant, "la loi n'est pas encore assez dure et les
moyens d'administration de la preuve sont insuffisants ou inadaptés, notamment
la confrontation avec le témoin accordée dans un jugement pénal devrait être
suspendue quand il s'agit d'enfants." Pour Mme Najat Answar, enfin, "la justice
marocaine a clairement pris conscience de l'ampleur du phénomène et heureusement
applique les lois avec plus de vigueur. Mais nous devons les renforcer pour une
plus grande protection de nos enfants. Les textes de loi doivent ĂŞtre encore
plus incisifs face à la pédocriminalité et le message envoyé au pédocriminel
doit ĂŞtre sans appel." Mais outre leur rĂ´le primordial dans la refonte et le
respect du système juridique, les différentes institutions officielles ou
associatives qui se sont développées ces 15 dernières années ont aussi et
surtout pour vocation de soutenir les enfants victimes en leur offrant un
accompagnement médical, psychologique et au besoin légal. "L'Association Touche
Pas Ă Mon Enfant", nous explique ainsi Mme Answar, "offre un encadrement aux
familles et aux victimes d'agresseurs. Nous nous portons partie civile pour les
victimes et leur proposons un encadrement juridique et si besoin, psychologique
dans la mesure du possible. Par cet appui, les victimes et leur famille sont
encouragées à porter plainte. De plus, nous essayons de mettre en garde les
parents contre les risques qu'ils encourent par une surveillance relâchée de
leurs enfants." M. Raji précise, quant à lui, que "l'ONDE oeuvre actuellement,
avec les départements concernés, à l'élaboration d'une stratégie nationale
globale de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants et a transmis au
ministère du Développement social et de la Solidarité ainsi qu'au département
chargé de la Coordination de la Commission interministérielle chargée de
l'Enfance, des propositions que ce soit dans le cadre du renforcement du
dispositif existant (juridique ou mĂ©dico-psychologique) ou de mĂ©canismes Ă
mettre en place pour assurer une meilleure prévention en prenant en
considération les recommandations des différents partenaires ayant pris part aux
congrès et rencontres organisées par l'ONDE, notamment ceux émanant des
associations de la société civile." Par ailleurs, "dès qu'un cas se présente au
Centre d'Ecoute et de Protection des Enfants Maltraités (numéro vert) mis en
place par SAR la princesse Lalla Meryem, il est pris en charge automatiquement
avec ses tuteurs. Nous leur réservons une écoute active et nous intervenons
auprès des instances administratives et juridiques concernées, conformément à la
Convention signée entre le ministère de la Justice et l'ONDE." Enfin, "de larges
campagnes de sensibilisation ont été organisées visant la mobilisation du grand
public et des familles, ce qui a enclenché une prise de conscience et un
véritable débat de société autour de ce sujet. Des actions sont aussi menées
avec les enfants eux-mêmes en mettant en place des mécanismes visant le
renforcement des droits et la culture de participation chez les enfants pour
assurer une meilleure prévention dans les espaces d'enfants. Il y a aussi le
rôle de la société civile faisant un travail de proximité pour lutter contre ce
fléau."
En savoir plus...
http://www.touchepasamesenfants.org
La solution ?
Entretien avec Latifa Bennari, Présidente de l'Ange Bleu
- Dans votre livre, vous insistez principalement sur la
nécessité de prévenir les agressions sexuelles, notamment par l’écoute des
pédophiles (i.e. des gens attirés sexuellement par des enfants) abstinents ou
passifs, considérant que les peines de prison encourues ne sont pas
dissuasives.
En effet, la prévention de la maltraitance sexuelle sur enfants est un sujet
sensible très abordé, voire exploité de nos jours dans le monde entier.
Malheureusement la prévention n’est qu’un vain mot. Il faut évidemment sortir de
ces oppositions stériles agresseurs/ victimes et des prises de position du type
"vous ne pensez pas aux victimes" ou "vous êtes une belle âme et vous ignorez
qu'il y a des gens dangereux" ou encore, le plus souvent à propos de ma démarche
; « êtes vous sûr qu’il ne passera jamais à l’acte, quelle garantie avez-vous
pour cela ? »
Ce type de discours fige tout débat constructif et notamment sur la prévention
du premier passage Ă l'acte. Contrairement, Ă ce que certains pensent, il est
possible d'agir mais il faut lever bien des obstacles. Il faut admettre que ce
n’est aucunement les violeurs ou les criminels de femmes qui rendent forcément
tous les hétérosexuels dangereux. Force est de reconnaître qu'il en est de même
pour la pédophilie. Le but de ma démarche, et vous l’avez très justement
compris, est de protéger les enfants. Et ce, sur le postulat suivant, qui est
d'une évidence frappante : un pédophile en souffrance livré à lui-même est
beaucoup plus dangereux ( à la fois pour les autres et pour lui-même ) qu’un
pédophile auquel on vient en aide. Refuser son aide à quelqu’un qui en a besoin,
le rejeter, c’est augmenter sa souffrance. Je doute fort qu'augmenter une
souffrance soit ce qui protégera le mieux les enfants. La stigmatisation aveugle
et systématique dont sont victimes les pédophiles est inutile à la protection
des enfants, pi elle la dessert. Il faut noter Ă©galement que bien souvent les
incestueux ne sont pas forcément pédophiles mais hétérosexuels (personnes
attirées par le sexe opposé). Des études ont à ce titre démontré la forte
occurrence de ce lien abuseurs/ non-pédophiles.
Le risque zéro n'existe bien évidemment pas, et cela est valable pour tous
dangers auxquels s'expose - naturellement ou par ses activités - le genre
humain. Ma démarche n'a pas prétention d'éliminer totalement le problème, mais
de réduire fortement le nombre d'abus, bien au-delà des chiffres actuels, sans
nécessiter pour autant les surcoûts procéduraux préconisés habituellement (les
frais qu'occasionnent pour la société les procédures judiciaires, le fichage
systématique des supposés délinquants et délinquants avérés, les coûts
d'incarcération, de soin, etc. sont astronomiques pour des résultats, il faut le
reconnaître, forts médiocres). Les gouvernements et les associations ont fait de
la pédophilie un enjeu majeur sans adopter les solutions préventives de base ,
seules à mêmes d'enrayer le fléau.
Pensez-vous que la prison soit alors complètement en
échec ou est-il nécessaire de maintenir un système de condamnation pour les
transgresseurs ? Serait-il préférable d’envisager des thérapies, éventuellement
inspirées de ce qui se fait par exemple au Canada, avec à la clé d’éventuelles
castrations chimiques ?
Compte tenu de la prolongation de la prescription, passée de 10 à 30 ans après
la majorité de la victime en France, j’assiste à une recrudescence des
signalements d’abus sexuels. Or il s’agit de situations souvent complexes et
difficiles à analyser par les enquêteurs tant d’années après les faits. Bien
qu’elle ne soit pas adaptée et n’offre pas de véritables solutions, la prison
offre aujourd’hui un sentiment d’apaisement qui vient calmer plus au moins les
angoisses de la société. Pourtant, et sans généraliser, il faut bien voir que
dans certains cas la prison peut se révéler destructrice non seulement pour l’
auteur, mais aussi pour l’entourage de celui-ci ( éventuellement sa propre
famille s’il en a une ), y compris si l’auteur n’a en tout et pour tout commis
qu’un seul dérapage dans sa jeunesse, trente ou même quarante ans auparavant. Il
est donc important de distinguer la procédure judiciaire de la construction de
la victime. N’importe quel juriste pourrait le confirmer : la justice n’a pas de
vocation thérapeutique comme on a tendance à le faire croire aux victimes. Même
si elle pourrait en quelques occasions catalyser un « effet secondaire » ce n’
est en tout cas pas sa mission. La procédure peut aider la victime à se
reconstruire certes. Mais dans certains cas, elle peut au contraire faire plus
de tord comme j’ai pu le constater dans bien des cas. Ce sont sur tous ces
fronts qu'il faut se battre. La sanction pénale est inévitable face à des actes
hautement répréhensibles mais elle doit être raisonnée, les thérapies doivent
pouvoir se substituer à l'incarcération quand cela est possible et se doivent
d'être adaptées au cas par cas.
Il ne faut donc pas entreprendre une démarche judiciaire à la légère. De plus,
elle n’est pas toujours nécessaire à l’ancienne victime. Les effets de la
maltraitance sexuelle sont très variables d’une personne à l’autre, en fonction
de la situation, du contexte, de la nature des actes, de leur fréquence, de la
personnalité de l’ancienne victime. Toujours est-il que la reconnaissance des
actes de la part de l’auteur est plus constructive pour la victime que les
sanctions judiciaires. Pour autant, cela ne signifie pas que les délits sexuels
doivent rester impunis, sous estimés. Car la maltraitance ou les abus peuvent
également avoir des répercussions très graves dans l’enfance de la victime ou
dans sa vie d’adulte. Elles sont souvent sources de souffrance et de désespoir.
Elles peuvent être sources de suicide ou d’échec dans la vie sociale,
professionnelle ou relationnelle. Un abus sexuel déguisé en initiation sexuelle
peut ĂŞtre facteur de reproduction des actes par certaines victimes quand bien
même la différence d’âge entre l’initiateur et l’initié n’est pas grande.
- 80% des demandes d’exception pour des mariages
précoces de jeunes filles, parfois à des âges aussi précoce que 13 ans, sont
actuellement acceptées, malgré la nouvelle Moudawana qui fixe l’âge légal du
mariage à 18 ans. Croyez-vous qu’il s’agisse là d’une dérive du système qui
favorise la pédérastie ? Pensez-vous par ailleurs que cela puisse conduire à une
dérive dans les jugements d’agressions sur mineurs pubères contre lesquels les
accusés auraient beau jeu d’arguer que la victime a « provoqué » son agresseur,
puisque par ailleurs on juge ces jeunes filles parfaitement en âge d’avoir une
vie sexuelle ?
- Que pensez-vous des lois marocaines concernant les agressions sexuelles en
général ? Des méthodes d’investigation des affaires ?
- Que pensez-vous du scandale de la fatwa lancée récemment par un agitateur
concernant le mariage avec des fillettes de 9 ans ?
Cette pratique de dérogation pour favoriser les mariages précoces est largement
utilisée depuis des décennies dans les pays musulmans. Le mariage de notre
prophète Sidna Mohamed avec lalla Aïcha a été et continue à être un argument
pour légitimer une transgression à la loi et à la morale. Car, à travers les
divers témoignages et les études faites sur le profil du Prophète Mohamed, il
s’avère qu’il n’avait aucune caractéristique pédophilique compte tenu de son
parcours sentimental. Je suis souvent interrogée d’une manière inavouable sur le
mariage du Prophète, invoqué comme prétexte par les pseudo bien-pensants. Je
considère et je l’exprime clairement que ces personnes cherchent à se dédouaner
ou à se déculpabiliser par rapport à une relation pédophilique. Valider une
telle fatwa, c’est légaliser le viol et la conduite vers toutes les dérives.
Cependant, il ne faut pas jeter l’opprobre sur tous les musulmans dont la
majorité respecte la moudawana qui fixe la majorité sexuelle de la future
conjointe à dix huit ans. Cette dernière catégorie reflète avant tout une
orientation sexuelle adaptée et socialement acceptable.
Ce n’est pas tant la fatwa qui est en cause, mais celui qui l’a lancée. Force
est de constater que le mariage précoce ne représente à mon sens qu’une relation
sexuelle pour les pervers dont le corps des fillettes ne constitue qu’un objet
pour assouvir leurs fantasmes et leurs désirs pédophiliques (attirances
sexuelles avant la puberté ) ou hébéphiliques ( attirances sexuelles entre 13 et
17 ans ). Cette pratique relève de la maltraitance sexuelle et devrait être
passible de poursuites pénales.
Si la majorité sexuelle est à 15 ans en France compte tenu de la liberté dont
témoignent les jeunes y compris des pré-adolescents, il n’en reste pas moins que
l’engagement dans la vie à deux ( mariage ou concubinage) est de plus en plus
tardif compte tenu des responsabilités auxquelles les couples sont confrontés de
nos jours. Un phénomène qui existe également dans tous les pays musulmans mais
occulté par la société, car considéré souvent hypocritement comme une pratique
occidentale.
Vous avez déclaré l’intention d’étendre l’action de
votre association l’Ange Bleu, en particulier au Maghreb. Quels échos avez-vous
de la situation ici et quelles sont les demandes qui vous sont adressées en
provenance du Royaume ? Avez-vous souvent l’occasion de correspondre avec les
associations existant sur le terrain ? Avec des victimes ? Avec des pédophiles
abstinents ou passifs ? Avec des agresseurs ?
Je tiens à vous rappeler que le Maroc et l’Algérie ont constitué ma première
école pour acquérir mes connaissances et conceptualiser ma méthode. Une démarche
qui s’est avérée pionnière dans le monde de par sa particularité et son angle
préventif. La médiatisation sur les chaînes hertziennes françaises et Internet
ont permis à l’Ange Bleu de dépasser les frontières de la France tant sur le
plan professionnel qu’associatif. Le Forum 8 qui a organisé le salon de l’Enfant
à Casablanca a sollicité ma participation deux années consécutives. A l’issu de
cet événement qui a réuni plusieurs associations qui oeuvrent pour la protection
des enfants, j’ai rencontré de nombreuses et nombreux correspondants ( ex-
victimes et déviants sexuels abstinents et passifs ) y compris parmi les
lecteurs du Magazine Citadine suite à une interview réalisée en 2007. Au-delà de
la collaboration avec l’Association l’Heure Joyeuse, SOS villages, et le
Complexe Social Oum Kaltoum dont les actions sont admirables, j’ai rencontré d’
autres associations comme l’Association Soleil qui œuvre pour les enfants
affectés par le VIH / SIDA au Maroc souvent suite à des abus sexuels, et auprès
desquels j’ai suscité beaucoup d’intérêt pour un travail de partenariat. J’ai
également eu l’honneur de rencontrer madame La Ministre Nouzha Skalli pour un
projet sur la prévention des violences familiales. Elle a porté un grand intérêt
à mon action et m’a encouragée à intégrer les institutions marocaines. J’ai
proposé à cette dernière d’apporter mes compétences au service de la protection
des enfants de ce que j’ai subi moi-même étant petite. Je dois avouer que le
courrier de félicitation de Sa Majesté le Roi et les encouragements de sa
conseillère, Madame Zoulikha Naciri, ont alimenté ma motivation et mon énergie
pour m’investir au Maroc. Depuis quelques années une politique sociale et
humanitaire se dégage du Maroc à travers les actions de Sa Majesté Mohamed VI,
menées sur tous les fronts du Royaume et touchants tous les domaines. C’est
pourquoi j’ai le plaisir d’annoncer à travers votre relais qu’une antenne d’
Ă©coute va ĂŞtre effective prochainement Ă Casablanca. Monsieur Mohamed Berrada,
Président et fondateur du Complexe Oum Kaltoum, offre à l’association l’Ange
Bleu un espace à l’instar de l’antenne en France.
- Quelles sont Ă votre avis les urgences Ă adresser
dans la lutte contre les agressions sexuelles sur mineurs ? Au Maroc ? En
général ?
Parmi les besoins formulés émanant du Maroc à l’Antenne de l’Ange Bleu en France
et quelques réflexions succinctes pour élargir concrètement mon action dans le
Royaume:
-Une structure d’écoute, d’information et d’orientation pour les familles ou les
proches d’enfants victimes d’abus sexuels.
-Une écoute pour des adultes abusés sexuellement dans leur enfance.
-Une écoute pour les personnes qui souffrent d’une attirance sexuelle envers les
enfants.
-Une Ă©coute pour les personnes qui ressentent toutes formes de compulsions
violentes y compris la violence sexuelle.
Pour ce faire, il est fondamental, d’apporter des amendements sur la répression
en matière de délit sexuel afin de punir les auteurs et ainsi dissuader les
agresseurs potentiels.
-Des mesures doivent être mises en œuvre pour l’évitement de la récidive par la
formation spécifique du personnel pénitentiaire chargé de l’insertion des
délinquants sexuels uniquement.
-Une prise en charge adaptée pour les sortants de prison.
D’après COCASSE (Coalition d’Associations Contre les
Agressions Sexuelles Sur Enfants), le tourisme sexuel et la prostitution
enfantine constituent une grosse part de l’exploitation sexuelle des mineurs.
Qu’en pensez-vous ?
En effet, l’exploitation des enfants prostitués est un drame pour tous les
enfants qu’ils soient marocains ou autres. Cependant, il ne faut pas focaliser
sur les touristes pour justifier ou dénoncer les abus sexuels. Le Maroc est un
pays fantastique en voie de développement qui ne doit pas symboliser
systématiquement le tourisme sexuel. J’ai moi-même réagis à la médiatisation
excessive lorsqu’il s’agit d’un délinquant sexuel étranger pour éviter de donner
une image négative du Maroc. Pour éviter tout amalgame sur qui fait quoi, j’ai
effectué des investigations auprès des enfants et adolescents prostitués afin de
déterminer les responsables de ce fléau. Force est hélas de constater qu’une
grande majorité de cette exploitation émane des citoyens du pays, des proches en
l’occurrence. Il faut noter que la France en particulier a voté une loi qui
permet à la justice française de poursuivre et sanctionner sévèrement ses
ressortissants transgressant cette loi même à l’étranger. Compte tenu des
statistiques, cette loi a été dissuasive pour un certain nombre d’abuseurs /
clients quand bien même le risque zéro n’existe pas. Malheureusement et
cependant, aucune loi ne protège les adolescentes et adolescents marocains des
prédateurs ou proxénètes agissant sur Internet . Cet outil se révèle le meilleur
pour le progrès, mais le pire pour les dérives. Il représente aujourd’hui un des
plus grand danger pour les jeunes notamment le tourisme sexuel. En effet, les
contacts et les rendez-vous avec les cyber-prédateurs sont plus discrets souvent
anonymes ce qui par conséquent favorise le développement de l’exploitation
sexuelle des personnes les plus vulnérables. La justice marocaine doit s’adapter
à ce phénomène nouveau de société qui fait des ravages en matière d’
exploitation. Des mesures répressives doivent être instaurées pour sanctionner
les cyber-délinquants. Pour ce faire, des moyens doivent être déployés dont la
formation des cyber-policiers / enquĂŞteurs, et des assistants socio-Ă©ducatifs
pour aider à l’insertion des jeunes prostitués, avec une prise en charge et un
encadrement adapté, des moyens en matière de santé pour la prise en charge
psychologique ou psychiatrique pour les personnes les plus fragiles.
"Le monde est dangereux non pas Ă cause de ceux qui font le mal, mais Ă
cause de ceux qui regardent et laissent faire"
Albert Einstein
- Quel message aimeriez-vous passez aux victimes d’
agressions sexuelles durant leur enfance ? Aux parents (quand ils ne sont pas
les agresseurs ?) Aux pédophiles ? Aux agresseurs ?
-Le message que j’ai envie de donner aux victimes abusées durant leur enfance,
est de franchir le pas pour parler et exprimer leur ressenti et demander de l’
aide en cas de besoin aux personnes compétentes dans la maltraitance sexuelle
des enfants quand bien mĂŞme la victime est devenue adulte.
-Le message que j’ai envie de transmettre aux parents ou proches des victimes,
est de pas se dérober de la réalité, de ne pas douter systématiquement des faits
révélés, ne pas jouer les psy en sous-estiment les faits révélés, ne pas rentrer
dans le déni pour se protéger, de ne pas responsabiliser la victime même en
absence de violence, de trouver si nécessaire une écoute attentive auprès des
professionnels formés dans le domaine, de ne pas prendre des décisions contre la
volonté de la victime, de ne pas agir dans la colère et l’émotion ( légitimes )
avant d’avoir un peu de recul.
Un autre message que je transmets Ă tous les parents et Ă toutes les familles Ă
savoir :
On assiste de plus Ă une forte recrudescence de consultations de sites
pornographiques, voire d'échanges de matériel pornographique, opérés par les
jeunes adolescents eux-mêmes. Cette recrudescence liée en partie à l'écart des
savoirs des parents avec ceux des enfants quand Ă l'usage de l'outil
informatique, Ă l'absence de sensibilisation et/ou mise en garde Ă l'Ă©gard de ce
média, le tout amplifié par les tabous interdisant le dialogue parents-enfants
sur les questions relatives à leur développement sexuel. L'absence de réponses
aux questions que se posent les adolescents sur leur sexualité conduit souvent
ces derniers à les rechercher par ces voies hautement préjudiciables pour leur
développement psycho-affectif et sexuel. Ce phénomène entraine souvent les
jeunes vers une orientation pédophilique liée à un manque de maturité par
rapport aux scènes ou images érotiques. N'oublions pas, tous les pédophiles ont
d'abord été des enfants. Et souvent, des enfants qui ont souffert. De plus,
malheureusement, certain des enfants d'aujourd'hui seront les pédophiles de
demain. Pour faire en sorte que ce nombre soit le plus restreint possible, il
faut s'efforcer de comprendre la genèse des attirances pédophiliques. Là réside
la clef d'une réelle prévention.
Compte tenu de l’absence d’une antenne d’écoute comme l’Ange Bleu au Maroc, il
me paraît difficile voire impossible de transmettre un message aux pédophiles et
aux agresseurs potentiels ou repentis marocains. En revanche, ces personnes
peuvent nous contacter en tout anonymat et selon leur possibilitĂ© par Internet Ă
l’adresse suivante : contact@ange-bleu.com. Comme je l’ai indiqué, le projet que
j’envisage de réaliser au Maroc, permettra à toutes les souffrances de s’
exprimer et de trouver des solutions adaptées. Ceci avec la collaboration des
institutions, du gouvernement et des associations concernées dont le but est d'être utile et non d’être visible.
© 2008, Citadine, MĂ©lanie Frerichs-Cigli - 1er novembre 2008
© 2005 : Association L'Ange Bleu - Conception : KANYOO - Développement : Willm N.
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